STRUCTURE ELECTRONIQUE DES MOLECULES

        Le modèle des molécules  purement géométrique est insuffisant pour rendre compte du comportement de celles-ci. Jusqu'ici nous avons raisonné sans nous poser la question de la liaison chimique, en ne considérant que des liaisons simples, doubles, ou triples et en les considérant comme constantes tant en longueur qu'en énérgie. Or il y a des variations importantes d'énergie de liaison en fonction de l'environnement.
    Une première approche consite à justifier ces variations à l'aide "d'effets", inductifs ou mésomères, présentés dans ce chapitre. Le chapitre suivant développe une analyse plus fine, mais plus mathématique de la liaisons chimique à partir des orbitales atomiques, elles mêmes obtenues par la mécanique ondulatoire.
     
    Les faits expérimentaux.
    Le moment dipolaire des molécules. L'effet inductif.
     
        Malgré les efforts de modélisation  force est d'admettre que la liaison est plus complexe que le simple trait qui la représente et surtout beaucoup plus variable d'un composé à un autre en longueur et en énergie. Qu'elle n'est pas inerte, elle est le lieu d'effet électrique (dipole). Qu'elle est ni régulière ni aussi fixe qu'on le pense dans un modèle géométrique.
    Tout d'abord les atomes qui composent une liaison sont pas toujours identiques. Ces atomes différents ne participent pas de façon égalitaire à la liaison la plus simple.
    Bien qu'assez complexe sur le plan théorique cette notion est facilement comprise (ou acceptée par les étudiants). Il s'agit de l'électronégativité . Selon le point de vue de Pauling étudié en première année, c'est une propriété de la liaison
     

    Tableau des électronégativités selon ALLRED- ROCHOW
    F 4,10 P 2,06
    O 3,5 Ge 2,02
    N 3,07 B, Te 2,01
    Cl 2,83 Ga, Sb 1,82
    Br 2,74 Si 1,74
    C 2,50 Me transition 1,7-1,2
    Se 2,48 Lanthanides 1,1-1,0
    S 2,44 Alcalino-Terreux 1,04-0,97
    I, As 2,2 Alcalins 0,97-0,86
    H 2,10

    Un liaison réelle n'est ni purement covalente, ni purement ionique, mais intermédiaire.A partir de la différence entre l'énergie mesurée de la liaison A-B et la moyenne géométrique entre l'énergie de la liaison A-A et celle de la liaison B-B, Pauling évalue une différence d'électronégativité entre les atomes A et B. Cette différence, qui rend la liaison plus forte, explique un caractère partiellement ionique des liaisons A-B.
    Mulliken reprend le même concept,  mais comme une propriété de l'atome, en faisant une moyenne entre l'électro-affinité et le potentiel d'ionnisation. Allred et Rochow de même,  calculent  la force qu'un atome exerce sur un électron en évaluant l'effet d'écran des électrons propres à l'atome.
    Dans tous les cas une echelle unique et commune est établie.
    Le moment dipolaire, en est la conséquence. On peut le traduire par une charge électronique partielle ponctuelle sur chacun des atomes +A-B- . Ceci en créant des irrégularités de charge au sein de la molécule la rendra capable de réagir avec des donneurs ou des accepteurs de doublets (charge négative mais parfois nulle ou positive  ) afin de former de nouvelles liaisons chimiques.
     
    mu
    ENERGIES H F Cl Br I O S N C
    H (kj/mol) 436 563 432 366 299 463 368 391 415
    F   158       212   270 440
    Cl     243         200 328
    Br       193         285
    I         151       220
    O           143   175  
    S             266    
    N               159 292
    C                 344
    Ainsi C-Cl donnera un carbone déficitaire en électrons et un chlore partiellement négatif: on note dipole .
    Moments dipolaires.
        Une grandeur directement liée à ce phénomène est le moment dipôlaire noté mu . Les centres des atomes porteurs des charges positives sont fixes dans la molécules.
    Les charges négatives des électrons sont en déficit pour chaque noyau puisque des électrons participent à la liaison. Si ceux si sont répartis également entre les deux atomes, tout reste simple. Les centres de gravité des charges positives et négatives coïncident . Quand une des atomes retient la majeure partie des électrons, il apparaît un dipôle composé des noyaux porteurs chacuns de la différence de charges à chaque extrémité de la liaison. Ce moment dipolaire est mesurable en coulombs par mètres, mais on lui préfère souvent une unité plus parlante le DEBYE (1D = 3,336 .10-30 C.m)
    mu = q.d  1 D =  1 charge   x 1 longueur de liaison
    Ce moment dipolaire exerce une action à distance sur les charges et les autres dipoles. On lui attribue beaucoup dans l'orientation des réactions, le pouvoir de solubilité des solvants et la cohésion des liquides etc..
     Voici les moments dipôlaire de quelques liaisons.
     à l'état gazeux sur des molécules types, les halogénures de Lithium
     




    LiF 6, 33 Li Br 7, 27
    LiCl 7, 13 LiI 7, 43
     On constate une augmentation de F à I  bien que l'électronégativité baisse, mais l'augmentation de la longueur de liaison est dominante.
    Pour les molécules carbonnées on est obligé de faire des mesures sur l'ensemble de la molécule, puis de décomposer le moment total en moment de liaison comme des vecteurs. Les mesures dans des familles de composés permettent de trouver autant d'équations que d'inconnues, autorisant le calcul des moments de liaison.
    On note que le moment dipolaire, en debye, d'une liaison est , à quelques % près la différence des électronégativités.
     
    Liaison Moment Liaison Moment
    C-H 0,4 C-N 0,22
    C-F 1,41 C-O 0,74
    C-Cl 1,46 C=O 2,3
    C-Br 1,38 Ctriple N 3,5
    C-I 1,19

    Le moment dipolaire de la molécule est en première approximation la somme vectorielle des moments de liaison. CHF3mu mesuré (gaz) = 1, 65 D  calcul  0,4 + 1, 41 = 1, 81
    Bien qu'on considère souvent les hydrocarbures comme dépourvu de moment dipolaire, il n'en n'est rien, même si la symétrie générale des molécules rend les valeurs faibles.  Mais la liaison  C-H est légèrement polarisée et dans le cas d'hybridation sp2 et sp le carbone est considéré comme plus électronégatif que dans l'hybidation sp3.
    Un aspect plus fin de ce phénomène est donné par le calcul LCAO des liaisons sigma entre atomes différents. Il met en évidence que la différence de niveau d'énergie entre les orbitales atomiques de chacun des atomes, entraîne une différence de participation de ces orbitales dans l'orbitale moléculaire liante sigma résultante. D'où une densité électronique plus grande vers l'atome porteur de l'orbitale plus stable. (Voir entre autre ARNAUD chim.phys 14-15 p133).
    Polarisabilité des atomes.
    Un autre phénomène est à prendre en compte. Si un atome est petit le noyau est proche des électrons et le nuage électronique soumis à un champ électrique ne se déformera peu ou pas. Tandis que si l'atome est gros,  un champ électrique pourra déformer le nuage dont les électrons externes sont moins soumis à l'action du noyau  positif, tant du fait d'un distance plus grande que de la présence d'électrons internes en plus grand nombre.
     
     
        Notion d'effet inductif.  L'effet inductif est la traduction globale, en terme de réactivité de la polarité et de la porarisabilité des atomes et des liaisons. Dans une molécule organique, les atomes comme les halogènes(F,Cl, Br,I), les chalcogènes (O,S,Se..) N et P seront attracteurs d'électrons, par rapport au carbone.
    Les métaux seront donneurs d'électrons, au carbone.
    Ces effets sont considérés comme se transmettant le long des liaisons avec un fort amortissement des liaisons sigma et mais une bonne transmission par les liaisons pi  plus polarisable.
     
     
    Effet stériques.
    Comme nous l'avons vu au précédent chapitre dans une molécule organique, les différentes conformations ne sont pas au même niveau d'énergie. Notament si de gros substituants sont fixés sur un carbone. La liaison de ce dernier avec un autre carbone pourra se rompre plus facilement car cette rupture autorise une décompression stérique. Celle-ci diminue donc l'énergie de la liaison d'autant.
    Variation des énergies de liaisons C-Y, Delta H° en kj.mol-1
     
     énergie
    C-H
    C-F
    C-Cl
    C-Br
    C-I
    Y-Me
    439
    460
    356
    297
    238
    Y-Et
    410
    448
    335
    285
    222
    Y-iPr
    395
    444
    339
    285
    222
    Y-tBu
    389
    460
    339
    280
    218
    Y-Ph
    464
    527
    402
    339
    272
    Y-Vinyl
    435
           
    Y-Acétylène
    548
           
    Y-Benzyle
    360
           
    Y-Allyle
    364
           
    Y-Propargyle          

      Variation des longueurs des liaisons simples C-Y en angström
     
    longueur  C-H C-F C-Cl C-Br C-I
    Y-Me 1,059 1,382 1,784 1,933 2,132
    Y-Et 1,059   1,802    
    Y-iPr 1,092        
    Y-tBu 1,099        
    Y-Ph 1,083   1,737    
    Y-vinyle 1,077   1,730    
    Y-éthynyle 1,061   1,6368    
    Y-benzyle 1,112        
    Y-allyle 1,117        
    Y-propargyle          
    Variation des maxima d'absorption UV lambda max et des epsilon
     
     
    Jusque là nous n'avons pris en considération que des liaisons simples. Quand des liaisons doubles ou triples sont formées entre deux carbones, les densités électroniques sont déplacées vers la liaison. Si le carbone sp3 est légèrement plus électronégatif que l'hydrogène, le carbone sp2 l'est d'avantage et le sp plus encore. Ce qui provoque la formation d'un dipole dans les hydrocarbures insaturés dissymétriques.
     
    Moments dipolaires de quelques hydrocarbures insaturés
    Hydrocarbure
    mu  en D
    Hydrocarbure
    mu en Debye
    H2C=CH-CH3 0,366 trans-but-2-ène  0 sym
    H2C=CH-CH2-CH3 0,34 cisbut-2-ène 0, 253
    HCtriple C-CH3 0,781 Me-2-propène 0,503
    HCtriple C-CH2-CH3 0,800 but-2-yne 0 linéaire symétrique

     
     
      Rappel: MÉSOMÉRIE,DELOCALISATION.

    Tout ce qui précède se réfère à des liaisons "localisées" entre deux atomes. La question de la liaison devient plus délicate quand les électrons d'une même liaison moléculaire sont répartis sur trois, quatre ou plus atomes.
     
       
    DOMAINE D'APPLICATION :
    Aspect physique du problème. La DÉLOCALISATION des électrons de liaison. Les mesures et les calculs confirment le fait que, entre autre, quand des liaisons insaturées sont alternées avec des liaisons sigma , un doublet électronique pi est localisé sur plusieurs liaisons. L'ensemble formé n'est plus une liaison double voisine d'une simple, mais un squelette sigma sur lequel des électrons pi se répartissent sur  l'espace s'etendant entre plus de deux atomes.
    Ceci est fondé sur plusieurs constats expérimentaux, notament dans la série des composés benzèniques
    L'état fondamental de l'ensemble est plus stable que la somme des états fondamentaux des doubles liaisons prises séparément ("énergie de résonance")
    Par exemple l'énergie de formation du benzène mesurée est supérieure de 38 kcal/mol à l'énergie calculée du modèle comportant 3 doubles liaisons éthyléniques.
    La réactivité du benzène est plus faible que celle de l'éthylène, notamment les additions d'halogènes, d'eau ne se font pas à froid et à l'abri de la lumière. L'addition d'hydrogène nécessite avec le même catalyseur une pression et une température élevées (100 atm et 150°C) au lieu de conditions normales (1 atm 25°C) avec les éthyléniques.
    Les longueurs des liaisons C-C, sont intermédiaires entre la liaison simple de 1,54Å, et la double 1,34Å, à 1,40Å, elles sont toutes égales.
    Le nombre d'isomères du benzène disubstitué est égal à 3 et non à 4 comme pour le cyclohexatriène, (2 ortho différents)
    Tout amène à penser que les liaisons C-C sont identiques et intermédiaires entre une simple et une double, donc que les électrons pi sont équirépartis sur la structure hexagonale, ce qui implique que toute formule de LEWIS est inexacte.
    On dit que les électrons sont délocalisés.
    Le concept de résonance a été introduit par Heisenberg en 1926 en relation avec les états quantiques de l'hélium. INGOLD en 1933 a proposé le terme de mésomérie.
    Ceci consiste à décrire un unique objet comme une combinaison de deux (ou plus) modèles.
    Du point de vue mathématique, le calcul consiste à rechercher la fonction d'onde du système réel en faisant une combinaison linéaire des fonctions d'ondes des diverses structures possibles. Les coefficients de pondérations sont ajustés de façon à minimiser l'énergie du système obtenu ou la stabilité maximale du composé. (méthode variationnelle).
    On prend comme équation de base les fonctions d'ondes moléculaires ou atomiques seul le résultat justifiant la pertinence du choix initial.(Méthodes LCAO, HMO, etc.).Voir le cours sur les LIAISONS
    La représentation de la molécule relève de la même logique.
    LA MESOMERIE DÉFINITION


    La mésomérie est une manière d'écrire les molécules qui donnent lieu à une délocalisation des électrons. La méthode d'écriture des formules dites de LEWIS symbolise la liaison entre deux atomes par un tiret, censé représenter deux électrons et des points représentant des atomes. Cet aspect géométrique des molécules décrit assez bien le comportement de la matière: Isomérie, sites fonctionnels, mais se révèle inadapté dans le cas d'électrons délocalisés. Entre deux atomes nous pouvons ainsi écrire des liaisons simples, doubles ou triples mais jamais un nombre non entier de doublets d'électrons. Or il n'est pas possible avec ce système d'écriture de représenter une molécule aussi simple et courante que le benzène.
    Les mesures de longueur de liaisons attribuent au benzène une structure hexagonale régulière, pour une formule C6H6, ce qui implique une moyenne de 1,5 doublets entre deux atomes, ces contraintes sont incompatibles avec notre système d'écriture.
    Le choix d'une représentation plus précise s'avérant délicat par sa lourdeur, on préfère garder des formules de LEWIS . C'est à dire de représenter un seul composé par plusieurs formules classiques, dites formules mésomères ou encore formules limites. Ainsi le benzène sera écrit par deux formules reliées par une flèche à deux pointes. Ce symbole signifie que les électrons pi sont aux  endroits indiqués sur les deux formules à la fois

      mésomérie du benzène
    Dans le cas du benzène, le délocalisation, n'implique pas de charge électrique sur un atome. On peut aussi écrire un hexagone avec un pointillé sur tout le périmètre intérieur pour indiquer la présence des électrons pi . Ou enfin, mais ceci est spécifique au benzène noter un cercle à l'interieur de l'hexagone. 
    USAGE

    On apelle conjugués, les électrons d'une molécule, écrite selon Lewis, participant à une délocalisation.
    Sont conjugués les doublets pi et non-liants , notés n, voisins. Sur un squelette d'atomes fixes on écrit ces électrons localisés. Puis on essaie de les placer ailleurs (liaison ou atome immédiatement voisin), tout en respectant les règles de valence usuelles,  pour les atomes électronégatifs sans modifier le nombre de 8 électrons maximum autour d'un atome, le carbone peut avoir 6 électrons pour donner un carbocation, (mais pas le Cl ou O, bien qu'ils puissent se trouver porteur de charges positives)
    La charge globale de la molécule ou de l'ion ne varie pas.
     
     
    On essai de minimiser les apparitions de charges ou d'électrons non appariés (radicaux).
    Une charge apparaît quand un doublet partagé d'une liaison passe sur l'atome voisin, ou quand un doublet non partagé passe sur la liaison ou l'inverse:
     
    Ex: ion énol de l'éthanal
    énolate
    le doublet non liant sur O devient pi entre O et C et le doublet pi entre C et C devient non liant 
    sur le carbone de droite, la charge disparue à droite sur O apparaît à gauche sur C, dans tous les cas chaque atome reste entouré de 8 électrons (partagés ou non, les e- partagés ne comptant que pour moitié dans le calcul de la charge).
    On note le symbole mésomère entre deux formes mésomères, (ne pas confondre avec l'équilibre chimique équilibre ).
     Enfin on imagine l'hybride de résonance comme une moyenne pondérée de toutes ces formes.
    La pondération est d'autant plus grande que la forme retenue est plus stable.
    Les formes chargées sont moins stables que les formes neutres.
    butadiène1
    Les formes avec charges voisines de signes contraires sont moins stables celles avec des charges éloignées.
    butadiène2
    Les formes avec charges voisines de même signe sont très peu stables.
    butadiène3
    L'hybride chargé est d'autant plus stable que la charge est répartie sur un grand volume.
    dodecahexène
    L'ACIDO-BASICITE des molécules organique, une conséquences des effets électroniques.
        Que ce soit à cause de la délocalisation, ou de la différence d'électronégativité, la molécule organique va présenter des irrégularité de densité de charge, qui a des conséquences fondamentales sur sa réactivité.
    Une réaction est l'établissement ou la rupture d'une, ou de plusieurs liaisons changeant la nature de l'espèce concernée. Ces liaisons sont formées par des électrons. Une approche féconde de ce phénomène  est la théorie de l'acidité selon Lewis.
    Au dela du role joué par le proton, dans un groupe important, mais limité de réactions, LEWIS a généralisé le concept d'acido-basicité en le centrant sur le doublet électronique.
    Un acide est une entité (ion ou molécule) disposant d'une orbitale vacante de faible niveau énergétique.
    Une base est une entité disposant d'un doublet non lié dans une orbitale occupée de faible niveau énergétique.
    La neutralisation est l'établissement d'une liaison entre l'acide et la base.
    Or ceci est le cas d'une très grande partie de réactions. (Voir chapitre relatif aux mécanismes réactionnels).
    Les effets vont avoir une importance fondamentale sur la stabilité des acides et des base selon Lewis.
        Par exemple, l'halogène présent dans une molécules simple comme le 2-bromo-2-méthylpropane, rend le carbone porteur du brome déficitaire en électrons. Dans certaines conditions le brome peut être arraché du carbone, donnant ainsi un cation carboné positif possédant une orbitale vacante, qui est un acide de Lewis. Si dans le milieu se trouve une base de Lewis suffisament puissante pour réagir, un sel de Lewis, c'est à dire une molécule nouvelle, sera formé.
        De même, une délocalisation peut favoriser la formation d'un acide ou d'une base de Lewis.
        Exemple, l'eau est une base faible du fait de la présence de doublets non liant sur l'atome d'oxygène. Si on remplace l'hydrogène par un cycle benzènique, on obtient le phénol, un doublet va participer à la délocalisation électronique sur le cycle, la densité est donc diminuée au niveau de l'oxygène et le phénol est très nettement moins basique que l'eau. Si un proton est arraché, l'anion correspondant est stabilisé par "effet mésomère" et la concentration de cet ion Ph-O- dans de l'eau est plus grande que celle en OH- dans l'eau pure.
    La TAUTOMERIE, deux formules pour une même espèce.
        Les "effets mésomères" justifient de façon assez satisfaisante un curieux phénomène appelé tautomérie, prototropie ou enfin desmotropie. Dans les espèces concernées un proton peut occuper des positions différentes sur un squelette donné sans que les propriétés des l'espèces soient modifiées. En fait deux structures différentes sont en équilibre chimique dans cette espèce, il existe plusieurs exemples, le plus simple est celui des acides carboxyliques de forme générales R-COOH.
    Dans ces acides les deux oxygénes jouent un role  comparable, ce qui n'est pas bien décrit par la formule moléculaire qui consite en un site alcool et un site carbonylé géminés, c'est à dire liés au même carbone. On écrit la formule
    acide1 - H+acide2 acide3 soit hybride ion carboxylate pour l'hybride
    Or en présence d'eau, l'acide est ionnisé au moins partiellement. L'ion formé présent une délocalisation électronique du au recouvrement des orbitales p du carbonyle et n de l'atome d'oxygène alcoolate. Cette délocalisation établit une symétrie entre les deux atomes d'oxygènes. La charge négative de l'ion est donc equitablement répartie sur les deux oxygènes.La fixation d'un proton pour redonner une forme neutre se fait donc indifférement sur ces deux atomes. Les deux molécules neutres sont en équilibre chimique.
    acide4
    Compte tenu de la symétrie propre de la molécule, cette exemple peut apparaître une subtilité superflue, mais si on introduit un  isotope de l'oxygéne dans la molécule, on "voit" par spectroscopie, le proton réparti sur les deux oxygènes.
        D'autres molécules présentent la même particularité, citons en particulier les cétones et les amides.
    Les cétones sont en équilibre avec les énols.équilibre céto-énolique
    Les amides sont en équilibres avec une autre forme amides Un exemple particulièrement frappant est le bullvalène, qui donne 1.209.600 structures différentes (10!/3) selon les positions des doubles liaisons, qu'on ne peut repérer qu'en présence d'isotopes du carbone.
    bullvalène bullvalène2
    Il y a 10 carbones et 10 hydrogènes et un axe d'ordre3 passant par le centre du cyle à trois carbones et l'atome de carbone tertiaire situé à l'autre extrémité de la molécule. Or les doublets de ce cycle et ceux des doubles liaisons s'échangent.En fait tous les atomes peuvent jouer les trois roles, cyclopropanique-éthylènique-allylique. L'expérience confirme (RMN) que les carbones sont identiques vers 100° et correspondent à une moyenne de ces roles. On notera surtout que ces formes sont des intermédiaires de réaction qu'on ne peut pas ignorer.
     
     
     
     
     
     
     
     
     
    EXERCICES

    1- Ecrire les structures de résonance pour l'anion énolate: CH2=CH-O-. Indiquer l'importance relative de ces structures et en déduire une forme hybride de résonance, justifier ainsi l'équilibre céto-énolique dit aussi tautomérie ou prototropie (transfert du proton mobile sur le différents sites négatifs d'une base conjuguée délocalisée) ou encore desmotropie (déplacement d'une liaison du grec desmos = lien).
      2- Ecrire pour le phénanthrène les cinq structures de résonance du type KÉKULÉ (sans charge ponctuelle) et montrer comment elles rendent compte du fait que contrairement au benzène, le phénanthrène n'additionne le brome qu'en position 9-10
    phénathrène
    Phénantrène
    3- Expliquer pourquoi l'acide acétique est plus acide que l'éthanol, et que l'aniline est une base plus faible que la méthylamine. 4- Le moment dipolaire de CH3-CH2-Cl est de 2,05 D, celui de CH2=CH-Cl est de 1,44D, sachant que le chlore reste le pole négatif, expliquer cette différence. 5- Le moment dipolaire du dichloro-1,2-éthane est de 1,10 D à température ordinaire. Lorsqu'on élève la température ce moment augmente jusqu'à atteindre 1,54 D à 270°C. Justifier ce résultat.
    Discuter la conformation à partir de la valeur de µ à la température ordinaire.
    6- Comparer l'acidité des composés suivants: Cl-CH=CH-CH=CH-CH2-OH (1)
    Cl-CH2-CH2-CH2-CH2-CH2-OH (2)
    Cl-CH2 -CH2-OH (3)
    Sachant que la polarisabilité de la liaison SH est 4,65 alors que celle de OH n'est que de 1,88 comparer l'acidité du thiol (4) à celle de l'alcool équivalent (3).
    Cl-CH2 -CH2-SH (4)
    Comparer l'acidité des produits (5), (6) et (7) suivants, en milieu acide d'un part et en milieu basique d'autre part.
    (C6H5)2N-CH2 -CH2-COOH (5)
    H2N-CH2-CH2-COOH (6)
    O2N-CH2-CH2-COOH (7)
    7- Ecrire les formes de mésomères des composés suivants: chloroéthyne ,chlorure de propargyle ,chlorure de vinylechlorure d'allyle ,
    chlorobenzènechlorure de benzyle .
    8- Ecrire les formes mésomères de l'amide, en donner aussi les formes tautomères. Amide
    9- Le diol cyclique, (acid squaric) suivant est un acide aussi fort que l'acide sulfurique (pk1=1,5 et pk2 = 3,5), tandis que le phénol est plus faible que les acides carboxyliques. Expliquer à l'aide de formes mésomères. acide squarique penta-1,2,3,4,5-fluorométhylcyclopentadiène
    Un autre composé organique, fluoré présente une acidité voisinne de l'acide nitrique,
    c'est le 1,2,3,4,5, pentakis(trifluorométhyl)cyclopentadiène.
    10- Ecrire les formes de résonance des ions cylopentadiènyle et tropylium (cyloheptatriène +). Justifier leur exceptionnelle stabilité. cyclopentadiènyle et tropylium
    11- Après avoir écrit les formes de résonance du dianion correspondant écrire le formes tautomères de la 2-6 dihydro-1,4-naphtoquinone dont une des formules est la suivante:
    naphtoquinone
    12- La molécule suivante, le phénol, possède des électrons délocalisés. Possède-t-elle un ou des sites nucléophiles, lesquels? Justifier par l'examen des formes mésomères

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